Le symptôme

Sophie Tellier-Gervasi » Psychanaliste Mme Sophie Tellier-Gervasi à Le Mans
Le symptôme

La façon d'envisager le symptôme est le point principal sur lequel se distinguent la psychothérapie analytique et les autres formes de psychothérapies.

Pour les psychothérapies, le symptôme ou le comportement symptomatique est une anomalie, un indésirable à éradiquer et à faire taire, sans comprendre ni ce qu'il veut dire ni sa fonction dans l'économie psychique du sujet. Les TCC par exemple, l'hypnose ou d'autres formes de psychothérapies, vont s'attaquer au symptôme de front, comme on attaque le virus de la grippe avec une chimiothérapie. Mise en œuvre d'un protocole, le même pour tous, sans considérer le sujet qui porte le symptôme. Mais si la grippe n'a pas de sens particulier - c'est une grippe point final -, le symptôme psychique lui, en a un : il est porté par un sujet, qui veut dire quelque chose au moyen de son symptôme ou de son comportement. Si ce « vouloir dire » n'est pas entendu, il peut s'en suivre une surenchère.

Il existe des thérapies à la mode. Elles sont dites "brèves", elles "marchent" et vite. Elles marchent, mais pas toujours. Il y a des échecs thérapeutiques. Par ailleurs, comment mesure-t-on leur "succès" ? Avec des chiffres et des statistiques dont on dit souvent : « Ils parlent d'eux-mêmes ». Mais non ! Ça ne parle pas « de soi » ; ça dit ce que l'on veut faire dire. Car les chiffres mesurent une efficacité à court terme, et sur un point précis : le symptôme. Or, le symptôme que l'on fait taire ressortira tôt ou tard sous une autre forme, souvent pire. Si vous coupez la pousse d'une plante en rhizome, une autre poussera à côté, plus vigoureuse encore. Les symptômes se déplacent en effet le long d'une tige que l'on appelle une chaîne associative, et peuvent surgir à divers endroits, sous différentes formes, avec une racine identique.

On comprend qu'a envisager ainsi le symptôme, la dimension subjective est totalement escamotée. Or il y a du sujet, il y a du désir, il y a de la vie autour d'un symptôme. Et c'est tout cela qu'il faut aussi porter et que porte une psychothérapie analytique.

Ainsi, l'éthique de la psychothérapie analytique est claire : le sujet n'est pas un animal machine à reprogrammer, reconditionner ou dresser. Le sujet n'est pas non plus un « sportif » qu'il faut « coacher » et le psychothérapeute ne doit pas décider pour vous ce que vous devez faire ou penser.

Bref, une psychothérapie analytique prend un chemin détourné pour aborder le symptôme, parce qu'il faut entendre ce que le sujet veut dire avec son symptôme. Et voir un enfant sourire en coin, d'un air de dire : « Ah ! Tout de même, tu as compris », lorsque vous interprétez ou traduisez avec justesse son comportement, est toujours un moment qui vaut le détour !

Et ce détour peut être bref. Toutes les psychothérapies ne s'engagent pas pour des années. Mais c'est dans ce détour qui permet de comprendre, que le symptôme cède et disparaît. C'est dans ce détour que l'on prend soin du sujet, tout entier, qui n'est pas un simple mécanisme à réparer.

Enfin, il faut rappeler que le symptôme ou le comportement symptômatique est la seule solution que le sujet a trouvé pour dire son mal-être. Il exprime sa singularité et parfois le symptôme fait tenir le sujet debout. Il faut alors y réfléchir à deux fois avant de s'y attaquer, pour éviter que le sujet s'effondre en même temps que cèdera son symptôme. Dans des cas extrêmes, le sujet s'est caché, protégé, réfugié loin au fond de lui-même. C'est le cas des enfants autistes par exemple. Les faire sortir de force de leur refuge est d'une violence sans nom et certaines méthodes, vantées comme des méthodes « qui marchent » obtiennent des « progrès » au prix d'une souffrance que peu d'adultes supporteraient. Il est parfois plus prudent et bienveillant d'attendre un peu sur le seuil du refuge, que le sujet ose se risquer à sortir, attendre, la main tendue, qu'il veuille bien s'en saisir.

Le symptôme est à la fois ce qui nous est le plus étrange et étranger, et ce qui nous est propre.

Il a toujours une fonction dans le psychisme et une signification.

Simplement, il s'exprime dans une langue étrangère, dont le psychothérapeute lui connaît la syntaxe.